Sophie Pichonnier termine ses études d'infirmière en 2018 et débute sa carrière au sein du service de gastro-entérologie de l'hôpital de Denain, dans le Nord.
Là, elle découvre un public particulier : les personnes en grande précarité et alcoolodépendantes. "Mais je les voyais juste pour le soin, indique Sophie. Il n'y avait pas d'accompagnement sur le long terme. Et quand elles arrivaient à l'hôpital, c'est malheureusement qu'elles étaient plutôt en fin de vie."
Sophie ressent le désir de soigner ces publics précaires, mais en ayant la possibilité d'intervenir en amont. "J'avais envie d'accompagner ces personnes mais en sortant du soin pur. Je voulais trouver plus de relationnel, ce qui fait souvent défaut à l'hôpital."
C'est dans ce contexte que la jeune femme tombe sur une annonce de Abrisanté, le Ssiad précarité (service de soins infirmiers à domicile précarité) de Valenciennes. Ce dispositif expérimental a ouvert en 2016 à Valenciennes dans le cadre d'un appel à projet de l'agence régionale de santé (ARS) des Hauts-de-France, après deux expérimentations concluantes à Lille et dans le bassin minier.
À l'origine des Ssiad Précarité, un constat : des personnes précaires se retrouvent en rupture de soin car il n'existe pas d'accompagnement sur le long terme. L'enjeu de ce nouveau dispositif sera donc d'offrir, à ces personnes qui oscillent entre la rue, les squats, les centres d'hébergement d'urgence et les résidences sociales, un accompagnement sans rupture.
Après huit ans d'expérimentation dans les Hauts-de-France, le dispositif devient national en 2022 et prend le nom d'Essip (pour équipe spécialisée de soins infirmiers précarité).
Sophie intègre Abrisanté en août 2021. Avec ses collègues, elle tourne au quotidien dans les différentes structures d'hébergement pour rendre visite à ses patients. La majeure partie de son travail consiste à assurer le suivi des traitements, principalement des traitements psychotiques et de substitution pour les personnes toxicomanes et alcoolodépendantes.
À chacun de ses passages, elle prend aussi le temps de discuter, conseiller, rassurer. Un relationnel essentiel à sa mission : sans lien de confiance, l'accompagnement ne peut se mettre en oeuvre. Il lui arrive de distribuer des traitements directement dans la rue, là où un patient a l'habitude de faire la manche, ou dans des squats. "Elle m'apporte du soutien et la santé. C'est très agréable", dit Frank, un patient.
"Quand on rompt notre accompagnement, il y a un risque que les patients arrêtent leur traitement, replongent dans leurs travers. Certains repartent en prison, ou des femmes retournent avec leurs bourreaux", regrette Sophie.
"C'est une nouvelle façon d'approcher le soin, via le social", précise-t-elle. Une approche sociale qu'elle s'est appropriée sur le tas, la formation d'infirmière prévoyant peu d'enseignements en la matière. Au contact des patients et des équipes éducatives des structures sociales, elle apprend tous les jours. Et se plaît dans un métier qui a du sens.
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