Faire intervenir un professionnel au domicile d'une personne dépendante, jusqu'à six jours d'affilée, pour réaliser les tâches habituellement effectuées par un proche aidant, c'est le principe du "relayage", avatar français du "baluchonnage" québécois.
Autorisé par la loi du 10 août 2018 "Pour un État au service d'une société de confiance", ce dispositif de suppléance de l'aidant par un salarié de l'aide à domicile est expérimenté par une quarantaine de porteurs de projet.
Parmi eux, l'Apei Ouest 44, associée à l'ADMR 44 et Al'Fa Répit. Avant de proposer ce service, les trois associations ont dû se mettre d'accord sur la fiche de poste, les missions et la posture professionnelle des relayeurs.
"C'est un nouveau métier", constate Virginie Saint-Pierre, chef du service "Aide aux aidants" à l'Apei Ouest 44. L'objectif est en effet que le salarié "réalise ce que fait l'aidant familial au quotidien : il devra respecter les habitudes de vie, faire les choses sans juger", poursuit-elle.
"Ce n'est pas forcément évident. En intervenant à domicile jusqu'à six jours consécutifs, ils amènent forcément un peu d'eux-mêmes et doivent trouver la juste distance".
Les offres d'emploi ont été diffusées en interne et à l'extérieur. "Le profil recherché ne correspondait pas forcément à des personnes diplômées", précise Virginie Saint-Pierre.
"Nous avons privilégié l'expérience, les qualités humaines, l'adaptabilité, l'autonomie, la connaissance du public (personnes âgées avec troubles cognitifs et personnes handicapées) et la capacité à vivre en dehors de son domicile pendant une période pouvant aller jusqu'à six jours".
Le recrutement a attiré une dizaine de candidatures. Trois relayeurs ont finalement été embauchés, en contrat à durée déterminée (CDD), par l'ADMR 44 : un auxiliaire de vie sociale déjà salarié de l'association, une auxiliaire d'accompagnement des élèves en situation de handicap (AESH) et une ergothérapeute en recherche d'emploi.
Tous ont suivi une formation de deux jours dont "le but était de clarifier les missions du relayeur et de les mettre en situation réelle", explique Virginie Saint-Pierre. "Nous avons donné des informations sur la connaissance du public. Et deux aidants, la mère de deux jeunes adultes en situation de handicap et le conjoint d'une personne âgée, leur ont expliqué leurs besoins, leur rôle et leurs craintes".
Cependant, la mise en place du relayage a soulevé "de nombreuses subtilités RH", confie enfin la chef de service de l'Apei Ouest 44. Car si un décret du 28 décembre 2018 a bien posé le cadre juridique de l'expérimentation dérogeant au droit du travail, il n'a pas levé tous les freins et questionnements.
"La question du contrat de travail, du temps de travail et des majorations éventuelles, de la rémunération du travail la nuit et le week-end, du temps de repos en cas de cumul entre les prestations de relayage et les missions habituelles… Voilà les obstacles que doivent lever les porteurs de projet", regrette ainsi Rachel Petitprez, directrice de l'association Baluchon France, qui en accompagne une dizaine.
Selon elle, "au Québec, les baluchonneurs bénéficient d'un statut spécifique qui leur permet d'être payé à la journée forfaitaire". La France n'en est pas encore là.
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A lire aussi l'article "Baluchonnage : 'Les départements ne sont pas sensibilisés'", paru sur Le Media Social (abonnés), et la tribune "Le baluchonnage, modèle venu du Québec", publiée par le magazine Direction[s].
Sur la photo, de gauche à droite : Hélène Guichard, responsable de secteur de l'ADMR 44 ; Martine Guilloux, aidante familiale ; Virginie Saint-Pierre, chef du service "Aide aux aidants" de l'Apei Ouest 44 ; Laure Racaud, directrice générale de l'ADMR 44 ; Véronique Mallard, directrice générale d'Al'Fa Répit ; Clément Chaussée, directeur général de l'Apei Ouest 44 ; Nadine Le Cadre, coordinatrice du service relayage.
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