Addictologie en prison : le travail de prévention d'une éducatrice spécialisée

Après avoir travaillé auprès d'enfants en difficulté, Marie-Bénédicte Raspilaire, éducatrice spécialisée, accompagne des détenus confrontés à des addictions.

 

Pousser les portes de la prison

 

Sitôt le diplôme d'Etat d'éducatrice spécialisée (DEES) en poche, en 2005, Marie-Bénédicte Raspilaire est embauchée dans une maison d'enfants à caractère social (Mecs) à Orly (Val-de-Marne) de la fondation Apprentis d'Auteuil.

 

En 2013, souhaitant revenir dans son Centre-Val-de-Loire natal, elle se porte candidate à un poste d'éducatrice spécialisée intervenant en milieu carcéral, créé au sein de l'Association nationale de prévention en alcoologie et addictologie de l'Indre (Anpaa 36). C'est ainsi qu'elle franchit pour la première fois, en 2015, les portes du centre pénitentiaire de Châteauroux et de la maison centrale de Saint-Maur (Indre).

 

Changer de regard sur les détenus

 

Un virage professionnel pas prémédité : "Initialement, je souhaitais prendre en charge des enfants", se souvient-elle. "Je n'avais pas forcément imaginé travailler en milieu carcéral. Quoique… Un professeur au lycée avait invité un surveillant pénitentiaire d'une grande bienveillance. Il avait bousculé les clichés que j'avais sur les prisonniers".

 

Mais c'est sa rencontre avec le directeur de l'Anpaa 36 qui a été déterminante : "Il s'agissait d'une création de poste, il fallait tout construire. C'était un beau challenge". Qui a notamment consisté à imaginer le protocole d'intervention en milieu carcéral dans le cadre réglementaire d'un centre de soins, d'accompagnement et de prévention en addictologie (Csapa).

 

Se former aux addictions

 

Ce poste est réparti à mi-temps au centre pénitentiaire de Châteauroux (constitué d'une maison d'arrêt et d'un centre de détention, et qui concerne les prévenus et les détenus condamnés à des peines courtes à moyennes) et à mi-temps à la maison centrale (qui accueille les longues peines).

 

"Nous faisons de l'accompagnement en addictologie de personnes en détention", explique Marie-Bénédicte Raspilaire. "Pour cela, j'ai d'abord dû découvrir ce qu'étaient les différents types d'addictions : avec et sans produits (alcool, tabac, cannabis, héroïne, médicaments, jeux, sexe, sport…)".

 

Aider ne s'improvise pas

 

Car aider les personnes détenues concernées par les addictions ne s'improvise pas. "L'Anpaa m'a formé aux techniques d'entretien adaptées", confirme-t-elle. "Et nous apprenons aussi beaucoup des gens que l'on rencontre. Nous les préparons à la sortie, nous les aidons à suivre leur obligation de soin, à connaître les structures, à ne pas couper le lien..."

 

"Je travaille dans une ancienne cellule que j'ai décorée. Les gens que je reçois ont l'impression de sortir un peu quand ils viennent. Ils apprécient qu'on leur accorde du temps, qu'on les écoute. Cela favorise l'alliance thérapeutique".

 

Une équipe pluridisciplinaire

 

La tâche n'est pas plus compliquée en détention qu'à l'extérieur. Au contraire. "Ici, le travail peut être facilité", confie l'éducatrice, qui évoque même "des conditions de travail idéales grâce à l'accueil de l'ensemble des professionnels".

 

De fait, si elle est seule à animer le Csapa sur le terrain, elle peut compter sur l'équipe pluridisciplinaire de l'Anpaa 36 qui comprend infirmiers, psychologues, médecins, tabacologue, diététicien, éducateurs référents de parcours (RSA). Sans oublier la coopération avec les personnels pénitentiaires, judiciaires ou hospitaliers, et d'autres travailleurs sociaux en addictologie. 

 

"Chaque jour est différent. Il n'y a pas de monotonie", conclut-elle.

 

 

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