Les racines du travail social sont profondément ancrées dans une histoire marquée, depuis le XIXe siècle, par l'action militante de pionniers de la défense de valeurs humanistes et de la justice sociale. Rien d'étonnant donc à ce que la question de l'engagement irrigue les débats du travail social et revienne régulièrement à l'ordre du jour.
Faut-il trouver un équilibre entre ses convictions personnelles et son positionnement professionnel ? Quelques pistes de réflexion.
Dans un numéro paru en 2018, La Revue française de service social, publiée par l'Association nationale des assistants de travail social (Anas) aux Presses de l'EHESP, explore ce thème dans un dossier intitulé "Travail social et engagement(s)".
Dans un contexte de "diminution des ressources et budgets contraints", les travailleurs sociaux peuvent se sentir "écartelés entre les problèmes sociaux qu'ils constatent, l'insuffisance des réponses existantes et une demande de rationalisation du travail qui peut leur sembler vider leur intervention de son sens", constatent, en éditorial, les coordonnateurs de l'ouvrage, Joran Le Gall et Cristina de Robertis, de l'Anas.
Les travailleurs sociaux engagent pourtant "une part significative d'eux-mêmes dans la relation" d'aide, "indissociable de leur qualité de professionnel", dans un mélange qui fait leur identité singulière.
Au-delà de cadres théoriques de réflexion, des pratiques sont présentées dans ce dossier, par exemple autour du secret professionnel – avec une contribution de Laurent Puech sur la création du site secretpro.fr, "outil engagé pour des professionnels engagés" –, ou autour de la désobéissance à certaines directives.
Six professionnels livrent enfin leur témoignage sur leur parcours – dont Didier Dubasque, représentant emblématique de l'Anas, qui s'exprime aujourd'hui au quotidien sur son blog personnel, "Ecrire pour et sur le travail social". "Peut-on être assistant de service social sans s'engager professionnellement ?", interroge-t-il frontalement pour mieux répondre par l'affirmative : "L'engagement fait partie de l'ADN des assistants sociaux".
Oui et non, nuance Fadila Derraz, assistante sociale dans un dispositif d'aide aux personnes sans logement ou mal logées. Elle-même militante de longue date du droit au logement, elle fait "la différence" entre son engagement personnel et sa pratique professionnelle.
Pour autant, "pour être travailleur social, il faut avoir un minimum d'empathie, d'engagement moral", estime-t-elle, mais il faut surtout être capable de "mettre en œuvre les politiques publiques, de les comprendre et de les expliquer aux gens".
Un positionnement qui n'exclut donc pas de s'engager pour une cause mais qui n'en fait pas une obligation. D'ailleurs, bon nombre de travailleurs sociaux "n'ont pas d'engagement militant", constate Fadila Derraz, dont la carrière l'a aussi menée en protection de l'enfance et en centres sociaux.
De là à appliquer à la lettre des politiques publiques sans les questionner, il y a un pas, que certains franchissent en portant sur les publics reçus un regard condescendant ou des jugements de valeur, sur leur "mérite" notamment, difficilement compatibles avec les principes du travail social. "Notre travail, c'est d'aider les gens à acquérir leur citoyenneté, à ne plus être tributaires de leurs interlocuteurs", conclut-elle.
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